La grande coiffe, symbole de l’Alsace,
présentée dans son évolution depuis la révolution française
jusqu’au milieu du XXe siècle.
La coiffe à grand nœud : où est-elle portée et depuis quand ?
La question peut surprendre. Et la réponse n’est peut-être pas celle que vous pensiez.
Le grand nœud appelée en alsacien « Schlùppfkàpp ou Bandelskàpp » est apparu tardivement, après 1850. Il a seulement été porté lors des grandes occasions dans un tiers du territoire alsacien. Dans le reste de l’Alsace, la femme porte les dimanches et les jours de fête des bonnets divers et variés, propre à chaque village.
Cette histoire est bien présentée au musée.
Pourquoi se couvrir la tête ?
Les églises chrétiennes se référant à Saint Paul, exigent que la femme se couvre la tête à l’intérieur et à l’extérieur de la maison. Pour l’intimité la coiffe blanche est prisée. A l’extérieur la femme se doit d’afficher son rang social. Après 1870, dans le Kochersberg et le Pays de Hanau, la femme va faire évoluer le nœud posé sur le bonnet qui était un signe de soumission, en un objet de séduction.
La Maison du Kochersberg possède la plus belle collection de coiffe du XVIIIe siècle.
Avant la révolution, la femme appartenant à l’élite affiche le magnifique bonnet dorée portée sur une sous-coiffe blanche souvent garnie d’une dentelle plissée ou tuyautée. La coiffe dorée est réquisitionnée par Saint Just le révolutionnaire, lors de son séjour à Strasbourg. Elle est fondue. L’or ou l’argent recueillis sont envoyés à Paris pour renflouer le trésor de la Nation.
Durant les années post-révolutionnaires, la femme va imaginer de nouveaux bonnets pour remplacer les coiffes confisquées. Plus question d’or ou d’argent. Les plus fortunées optent pour la soie brochée. Pour bien maintenir en place les nouveaux bonnets plus légers que le bonnet doré chargé de pierreries, elle y rajoute un ruban de couleur d’environ 4 cm de large. Il est glissé dans la coulisse puis noué sur le front où il forme un petit nœud seyant.
Vers 1850, dans le pays de Hanau et dans le Kochersberg, le ruban va s’allonger et s’élargir. A présent il fait 10 cm de large. La raison de cet agrandissement reste un mystère. Toujours placé au-dessus du bonnet il retombe en 2 pans de chaque côté du visage telles les « oreilles d’un cocker ».
Après 1870 et la défaite de Sedan, probablement sous l’influence la mode allemande, le ruban continu à prendre de l’ampleur. La femme invente un nouveau mode de plissage qui va lui permettre de le dresser sur la tête, telles des ailes de papillon. Les plis rayonnants rendent la coiffe encore plus séduisante au point de devenir à travers le monde, sous l’influence de Hansi, le symbole de l’Alsace perdue par la France. Et le ruban grandi, grandi … . La cocarde est rajoutée par les alsacienne ayant optée pour Paris. De grâce il ne fallait pas les confondre avec les allemandes en goguette dans la capitale. Hansi les a dessinés durant 18 mois, dans ses œuvres. Lors des victoires de la France sur l’Allemagne, les femmes l’ont épinglé sur le grand nœud pour bien signifier aux vainqueurs qu’elles étaient françaises.
En 1900, la coiffe atteint son apogée. Le ruban des catholiques nécessite une pièce de soie de 4,60 m de long et 30 cm de large. Les coquettes le rallonge avec de la dentelle ou des franges. Les protestantes se contentent de 3,40 m. Toutes les femmes protestantes portent le ruban noir ainsi que les femmes mariées catholiques. La jeune fille catholique porte la coiffe fleurie, à carreaux ou rayée.
Les rubans de couleur sont portés dans le Kochersberg. L’ensemble des villages appartenant aux Hanau-Lichtenberg étant protestants, ils n’y sont pas portés. Le plus courant est le ruban noir brodé de fleurs. Le ruban de couleur ivoire se porte à Truchtersheim et ses environs. II est imprimé d’un semi de fleurs. S’il est bordé de bleu, la propriétaire habite une paroisse du secteur qui honore particulièrement la Vierge Marie. Les rubans rayés ou écossais appartiennent aux jeunes filles d’origine plus modeste. Les jeunes filles de Geispolsheim portent durant la belle saison le ruban rouge garance à picots en souvenir du sang versé à la fin de la révolution par l’assassinat du maire et du curé.
De nombreux bonnets sont exposés dans des vitrines. Ils sont souvent réalisés en velours de soie noire et bordés à l’avant d’une chenillette en velours. Ceux en velours pressé présentent des motifs en relief de fleurs ou de feuilles. Munis d’une bride, ils sont destinés à recevoir le grand nœud, uniquement dans le Kochersberg ou le Pays de Hanau. Les bonnets de la femme catholique sont richement brodés au fil d’or ou d’argent, de canetille, de pierreries. Les motifs représentent souvent des épis de blé ou des roses stylisés. La femme protestante ou juive préfère les bonnets plus austères décorés de tulipes et de demi-lunes réalisées au fil vert, violet ou doré. Ceux des veuves ou des dames âgées sont brodés de fil noir.
L’entretien. La rigidité du grand nœud n’est obtenue ni par amidonnage, ni par des supports en bois ou en métal. Le vinaigre blanc dilué à 10 % avec de l’eau, humecté délicatement sur le ruban donne cette tenue après repassage au fer doux.